Ils étaient deux très bons jeunes ouvriers, mâalem soudeurs chez moi. Issus du quartier le plus pauvre d'Inezgane, Jorf, ils arrivaient à l'heure et faisaient du très bon travail.
Je leur donnait le maximum que permet un secteur malade de l'informel et du mépris ambiant pour le travail manuel en général.
Ces deux jeunes refusaient toujours leurs misérables conditions sans commune mesure avec la vie dans les villas et les appartements de luxe où ils travaillaient.
Ils ont donc pris deux allers pour Istanbul. De là, ils sont passés en Grèce puis ils ont fait durement la traversée de Corfu en Grèce à Brindisi en Italie... Début février, ils étaient parmi des réfugiés syriens en Bavière, au sud de l'Allemagne.
Ils étaient très contents de l'accueil des Allemands. Non seulement très bien nourris vêtus et logés, mais ils avaient de l'argent de poche ! ... Mais vers la mi-février, ils m'ont téléphoné. Ils étaient terrorisés à l'idée d'être renvoyés manu militari au bled.
- Si jamais ont nous fait revenir, notre place sera avec les terroristes ou en prison ! Me répètent-ils.
- Puisque vous avez détruit votre passeport, il ne vous reste plus qu'à détruire vos empruntes digitales. Achetez du Geist von Salz et du Bleichmittel et ajoutez-y un peu d'eau. Mettez vos doigts dedans et le répertoire national des empruntes digitales vous rejettera dans les masses syriennes inconnues. Ne parlez surtout pas marocain !
Apparemment ma recette a bien marché !
D'ici deux ou trois ans, ces deux jeunes olads lahlal (bons enfants) commenceront à envoyer des devises au bled pour que d'aucuns se payent de belles 4X4 made in Germany !
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